JM et les chefs coutumiers de la République démocratique du Congo

26 August 2005

Refuser l’amalgame

l'express du 26/08/2005

Les politiciens n’en finissent pas de jeter l’opprobre sur les conseillers nommés par leurs adversaires. Pendant tout le long de la précédente législature, des députés de l’opposition ont réclamé et obtenu que soient rendus publics les noms et les salaires des conseillers des ministres. Et, à peine 50 jours après l’alternance, la nouvelle opposition a déjà interrogé la majorité, au Parlement, sur les conditions d’emploi des conseillers des ministres. La manœuvre, à n’en pas douter, vise à susciter une réaction d’envie, voire d’hostilité, envers les collaborateurs du gouvernement. Ce n’est pas dans l’intérêt du pays de s’acharner ainsi sur l’ensemble des “advisers”.

Certes, il y a des aspects de la nomination des conseillers qui sont condamnables. Cette pratique est souvent empreinte de copinage et de clientélisme. Mais il faut éviter l’amalgame. Plus on s’acharne à jeter en pâture les conditions d’emploi de ces nominés politiques, moins on a des chances d’attirer des personnes compétentes pour encadrer les dirigeants politiques. Déjà ils sont rares les intellectuels et gens d’expérience qui osent avancer dans le champ politique. Maintenant, si on les exclut également de l’entourage des ministres, on finira par encourager la médiocrité à tous les niveaux.

Il est vrai que les nominations sont parfois faites à partir de l’assortiment des courtisans, des colleurs d’affiche, des gens frustrés de n’avoir pas eu d’investitures ou des partisans aveugles. Mais les plus influents des conseillers possèdent souvent des aptitudes reconnues dans leurs sphères de compétences. S’ils manifestent un indéfectible dévouement envers les ministres qu’ils servent, cela ne peut qu’aider les rouages de l’administration publique à être bien huilés.

Il y a parmi ceux qui acceptent le poste de conseiller des personnes tout à fait respectables qui ont des compétences pouvant donner droit à des salaires élevés dans le privé. Ceux-là n’ont rien à voir avec les opportunistes qui se frottent les mains à l’arrivée d’un nouveau gouvernement dans l’attente des juteuses prébendes rattachées aux postes de conseillers ou de présidence de conseil d’administration des organismes parapublics.

Il est dangereux de créer un climat délétère autour de la question et d’effaroucher les personnes qualifiées capables de donner des conseils techniques. Quand les conditions d’emploi des conseillers sont étalées au grand public, ces derniers ont l’impression d’être traités comme des profiteurs alors qu’en réalité, certains d’entre eux servent le pays dans un esprit d’abnégation.

Sous l’ancien régime, une campagne vigoureuse avait été menée contre Jean Mée Desveaux, conseiller de l’ex-Premier ministre. Cet économiste touchait, au service de l’ancien gouvernement, moins que ce qu’il pouvait gagner en tant que cadre du secteur privé. Mais il a néanmoins été la cible de coups, souvent sous la ceinture. Heureusement que cela n’a pas découragé, sous l’actuel gouvernement, un Jean Suzanne à accepter le poste de “Senior Adviser on Information Technology Matters”. Le virologiste Nand Pyndiah également pourrait être embarrassé d’être mêlé à la campagne habituelle contre les conseillers. Il faudrait s’y prendre autrement si on veut que cessent les abus du “système” mis en place depuis 1983.

Le recrutement de cadres du privé pour conseiller les ministres est un excellent moyen de combler le fossé entre les dirigeants politiques et les opérateurs économiques. Sans le pragmatisme des hommes d’affaires, les ministres restent confinés à la froideur des bureaucrates.