Bunwaree se dit victime d'un ''acharnement politique''. Ong Seng est aujourd'hui posté à Washington. |
C'est sur la base des notes et correspondances consignées dans le dossier officiel par le "Senior Financial & Management Analyst" du ministère des Finances, que le Conseil des ministres a référé l'affaire du projet du consortium SWE Fort George Sugar and Power Ltd à la police. Seraient mis en cause : l'ancien ministre des Finances, Vasant Bunwaree et l'ancien secrétaire financier, Philippe Ong Seng.
Par Rajen Bablee
L'Hebdo du 22 juin 2003
Le 4 août 2000, le Senior Financial et Management Analyst du ministère des Finances, Koomansing Dawonauth, rédige une correspondance à l'intention de Norland Suzor, Managing Director de SWE Fort Georges Sugar à Power Ltd. Elle porte la référence CF/50/10/50/40. Quatre clauses y figurent. Il y est précisé que par rapport au projet de raffinerie sucrière et de centrale électrique dans le port-franc, le ministère des Finances n'a aucune "objection in entering into a Project Implementation Agreement with your company with regards to the above project".
Dans la troisième clause, Koomansing Dawonauth précise que le ministère veut bien inclure certaines provisions dans l'accord d'implémentation du projet. "We are, in principle, agreeable to the inclusion of the following key provisions".
La quatrième clause est la plus importante. La mise en application de l'accord nécessitera l'aval du gouvernement. "The Project Implementation Agreement with SWE will be subject to Government approval". Cette clause sera le grain de sable dans le moteur du SWE de Norland Suzor. Selon nos recoupements, elle aurait provoqué une certaine réticence des agences de financement que l'homme d'affaires avait sollicitées pour réaliser le montage financier de son projet. C'est ainsi que selon la version de Koomarsing Dawoonauth , le 29 août 2000, alors que la campagne électorale battait son plein, les promoteurs de SWE auraient sollicité le ministre des Finances d'alors, le Dr Vasant Bunwaree, et le secrétaire financier Philippe Ong Seng, afin que la dernière clause soit enlevée de la lettre du 4 août.
Toujours selon la version de Koomarsing Dawonauth, le secrétaire financier d'alors lui aurait demandé d'émettre une nouvelle lettre sans la clause qui gênait tant les démarches des promoteurs.
"CE SONT DES DIRECTIVES"
Le comptable, selon ses dires, aurait émis des réserves face à une telle directive. "Vous n'avez rien à craindre. Ce sont des directives. Le ministre et moi-même nous allons l'approuver", aurait dit Philippe Ong Seng. C'est du moins la version de Koomarsing Dawoonauth.
Sur ce, il aurait officiellement consigné les directives de Philippe Ong Seng dans une "minute" que ce dernier aurait approuvée et signée. Toutefois, au lieu d'une lettre, le fonctionnaire devait en envoyer deux à SWE Fort Georges Sugar & Power Ltd. Les deux correspondances portent la même référence que celle du 4 août. L'une d'entre elles est en tout point semblable à celle du 4 août et fait référence à une lettre de Norland Suzor en date du 24 juillet 2000. Cependant, la quatrième clause n'y figure pas.
La deuxième lettre émise le même jour et portant la même référence, toujours signée par Koomansing Dawonauth, est en réponse à une lettre de Norland Suzor en date du 8 août 2000. Le Senior Financial Et Management Analyst du ministère des Finances est formel : l'ébauche du Project Implementation Agreement (PIA) est actuellement à l'étude. Les facilités demandées par SWE ont des implications financières et légales importantes pour le gouvernement et tout accord entre le gouvernement et la compagnie SWE Fort Georges Sugar & Power Ltd sera sujet à l'approbation du gouvernement. "In view of the above, the proposed Project Implementation Agreement between Government and SWE will be subject to Government approval".
Au ministère des Finances, l'on explique que le fonctionnaire avait émis la deuxième lettre afin justement de protéger les intérêts de l'Etat contre une éventuelle réclamation sur la base de la deuxième lettre qui omettait la clause concernant l'aval du gouvernement.
"La nouvelle lettre exigée par les promoteurs de la raffinerie et la centrale thermique devait seulement être utilisée pour faciliter la réalisation du montage financier auprès des agences étrangères. Il appartiendra maintenant à la police de décider à la lumière de leur enquête si les promoteurs et ceux qui avaient donné les directives à Koomarsing Dawoonauth n'ont pas commis des infractions au code pénal", nous a déclaré une source au ministère des Finances.
Dans les milieux proches de Norland Suzor, l'on récuse une quelconque entente délictueuse. "Il est peut-être vrai que cette clause a été enlevée pour faciliter la compagnie de Norland Suzor à convaincre les financiers, mais qu'est-ce que cela implique réellement ? Est- ce que le Dr Vasant Bunwaree aurait pu passer outre le conseil des ministres pour avaliser personnellement un projet de cette envergure ? Cette clause vient simplement dire que l'accord entre le gouvernement et la SWE se ferait seulement si le gouvernement était d'accord. Cela va de soi", affirme-t-on dans les milieux proches de Norland Suzor.
Dans ces mêmes milieux, on soutient que la clause impliquant une garantie par le gouvernement mauricien, telle qu'elle a été consentie pour le projet de centrale thermique et d'une raffinerie de sucre à travers le consortium SWE Fort George Sugar and Power Ltd, n'est pas unique. On cite la réponse du CEB à une question des soumissionnaires pour le projet de centrale thermique. A la question : "Will the Government of Mauritius guarantee CEB's obligation under the PPA ?", la réponse est : "The Ministry of Public utilities has informed the CEB that the Government of Mauritius has agreed, in principle, to guarantee CEB's obligations under the proposed Power Purchase Agreement (PPA). The Ministry of Public Utilities has further advised that the Governement's approval would have to be sought when the CEB's actual payment obligations in the final PPA are determined.''
Pour leur part, les proches de l'ancien ministre des Finances, le Dr Vasant Bunwaree, parlent d'une "manœuvre politique initiée pour embarrasser" ce dernier. Selon ces sources, l'actuel gouvernement était au courant de tout ce que contenait ce dossier depuis son arrivée au pouvoir en 2000. Elles trouvent "bizarre" que le dossier ait dormi dans les tiroirs durant quatre ans pour faire surface après que Norland Suzor eut contesté le choix du Central Electricity Board (CEB).
Selon un membre du conseil d'administration du CEB, c'est effectivement l'affidavit de Norland Suzor qui a tout déclenché. "En effet, c'est en consultant le dossier officiel que les hommes de loi chargés de défendre le ministère des Finances ont découvert la supercherie organisée dans le but de tromper des agences de financement", nous a-t-il déclaré.
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