JM et les chefs coutumiers de la République démocratique du Congo

26 April 2006

From the horse’s mouth

Le Champ de Mars connut une baisse de fréquentation entre 1996 et 2002.

l'express du 26/04/2006

Par Jean-Mée DESVEAUX

Il a suffi qu’un nouvel opérateur de Totalisator sponsorisé par messieurs Gudjadhur se mette en concurrence directe avec l’Automatic Systems Limited (ASL) dont la figure de proue est son président Jean Hardy, pour que tous les anciens démons de notre psychose nationale viennent à nouveau nous hanter.

Dans un domaine comme les courses hippiques, avec les connotations socio-économiques quelles comportent depuis des siècles, cette confrontation n’aurait pu manquer de faire rejaillir de notre subconscient national morbide ces éternelles étincelles qui sommeillent au fond de chacun des fils de ce sol maudit. Nous avons aujourd’hui un “Tote le Pep” et un autre qui, ne serait-ce qu’implicitement, ne l’est pas, bien qu’il s’agisse d’une compagnie publique qui est cotée à la Bourse de Port-Louis.

C’est le risque toujours présent que ces animosités avaient, si ce n’est d’engouffrer le pays corps et âme dans un brasier incontrôlable, du moins de créer un gouffre toujours plus profond entre les divers acteurs de cette industrie, qui avait poussé le gouvernement précédent à se pencher sur l’état des lieux au Champ de Mars. L’approche avait été en fait extrêmement “globale” dans sa méthode comme dans sa philosophie !

Deux événements allaient précipiter les choses. Tout d’abord un haut officiel du ministère des Finances qui, se substituant au législateur dans ce domaine durant les dernières années du vingtième siècle, avouant à qui voulait l’entendre qu’il fermerait le Champ de Mars s’il le pouvait, avait tellement plombé les ailes de l’industrie des courses avec des hausses répétées de la taxe sur le pari hippique que son vœu se voyait quasiment exaucé.

Les recettes de l’industrie déclinaient drastiquement, les impôts qui avaient d’abord fait un bond, arrivaient à un plateau mais, plus important encore, le Champ de Mars se vidait d’année en année et de journée en journée entre 1996 et 2002. Ce qui était tragique dans cette baisse de recettes officielles et ce désemplissement du Champ de Mars c’est qu’en revanche, les jeux clandestins avec tout ce qu’ils comportent de fraude en tout genre, gagnait du terrain en “off course”.

L’histoire retiendra le paradoxe que c’est un vice-Premier ministre (vpm) et son conseiller aussi superbement indifférents aux courses, l’un et l’autre, que le grand commis de l’Etat, qui allaient aider à renverser la vapeur et remettre une industrie qui procure un divertissement à une dizaine de milliers de Mauriciens sur des bases solides.

Le deuxième élément catalyseur fut l’offre de rachat du Domaine Les Pailles par son ancien propriétaire, pour y faire des courses hippiques avec des investisseurs étrangers. On peut difficilement imaginer la réaction du VPM quand un officiel du Mauritius Turf Club (MTC) sympathique mais pas diplomate pour un sou, déclara tout de go : “vous n’avez pas le droit d’ouvrir un autre hippodrome car le MTC est le seul autorisé par l’organisation internationale des clubs hippiques à organiser des courses dans le pays !” On ne saura jamais ce qui serait advenu de cette discussion si les investisseurs étrangers qui allaient aider au rachat du Domaine Les Pailles n’avaient pas disparu aussi vite qu’ils étaient venus.

Il devenait dès lors clair dans l’esprit du gouvernement que la baisse du taux d’imposition, qui avait doublé dans certains cas, allait être l’occasion d’introduire des changements radicaux au sein de l’industrie. Ces changements allaient être axés autour de cinq pôles principaux :


La transparence et la démocratisation du Club étaient primordiales dans l’approche du gouvernement.

a. Le président du MTC prit l’engagement solennel en 2003 avec l’appui de sept de ses officiels de tout faire pour trouver un “new mindset that will address the image problems and review the Club’s situation, with a view to bringing it more in line with current social realities in the country….” “The MTC wants to assure Government that it is fully committed to this reform process .The Club stands ready to entertain any suggestion for re-launching horse racing on a firmer footing(….) provided the interests of all parties…are taken on board and fairly dealt with. We believe it is possible (...)to reposition horse racing both as a national entertainment and a thriving economic activity. The MTC is prepared to consider redefining its organisation and structures to be more in tune with new social realities. The Club commits itself to carefully considering reform proposals in that area(...)all issues (spoken and unspoken) should be placed on the table, with an open mind, in a genuine attempt at moving forward, instead of(…)cultivating suspicion. A broad Government-MTC exchange should leave no issue out- whether legal, administrative, organisational, fiscal, ethical or practical.”

b. Le consultant du MTC fit des propositions formelles en janvier 2002 aux officiels des Finances et de la State Investment Corporation (SIC ) :

i. MTC organisation to take into account integrity of races

ii. Stables should be companies

iii. Re-engineering of MTC is necessary since it is at the heart of a Rs 2 billion business, yet is managed like a private club;

iv. change in paradigm needed .

v. Separation between racing stewards and the executive team

vi. Enhance integrity; more independence from stables.

Le besoin de transparence allait être assouvi par le rôle du Horse Racing Board (HRB) tandis qu’un plus grand brassage de membres allait être la priorité une fois que le nouvel hippodrome se ferait construire car les membres existants dépassaient déjà la capacité des espaces qui leur étaient réservés au Champ de Mars. Il faut aussi, en toute justice, reconnaître qu’une visite imprévue aux espaces réservés pour les membres ne démontre aucune chasse gardée, bien au contraire. Il est d’autre part évident que certaines orientations citées en haut s’estompèrent devant d’autres démarches plus pressantes du dossier. Mais ce qui est différé n’est pas perdu et les écrits (et on espère l’esprit) restent intacts au MTC.

Un commentaire sur le HRB. Il existait deux modèles de ce Bill qui variaient selon le degré d’autoritarisme du HRB. Il a fallu éviter les deux extrêmes 1) que le HRB soit le rubber stamp du MTC d’une part ou 2)qu’une armée de fonctionnaires nommés par le gouvernement régissent une activité essentiellement privée à la manière soviétique d’autre part. C’est ce qui cause le cafouillage autour de l’identité de l’autorité hippique aujourd’hui. Une logomachie entre la MTC et le HRB est au centre d’un débat stérile en ce moment à savoir lequel des deux mérite le titre d’ “autorité hippique”. L’identité du porteur du titre ne devrait pas peser d’une telle importance si les deux structures comprenaient des personnes raisonnables.


Les bookmakers :

Si le prix à payer par le MTC pour voir baisser les impôts sur l’industrie était un “Horse Racing Board breathing down its neck”, les bookies allaient aussi avoir leur contrepartie à payer pour cette baisse de taxe qui allait augmenter leur chiffre d’affaires et leurs bénéfices. Il n’est pas nécessaire d’être devin pour savoir qu’au départ le reste de l’industrie n’aurait pas été mortifié si le gouvernement décidait de ne plus renouveler le permis des bookmakers. L’argument, très valable dans ce sens, était que le “fixed odd bets” que pratiquent les bookmakers est le miel même qui attire toutes les fraudes et courses arrangées. En effet, quel que soit le sommet où grimpe la cote du cheval, (due à la magouille qui a eu lieu entre- temps), le punter qui a misé sur ce cheval au départ, en connaissance de cause du tripatouillage qu’il allait lui-même opérer, voit ses efforts pleinement récompensés. Le système du totalisator, en revanche, ne contient pas ce talon d’Achille. Ici, alors que la cote du cheval monte, le gain potentiel initial du punter descend, ce qui ne l’incite pas à jouer au deus ex machina.

Ce qui a fait que le gouvernement refuse de prendre cette voie, c’est non seulement le fait que ce serait empoisonner l’atmosphère intercommunautaire des courses encore un peu plus, ( les bookies étant essentiellement issus de la communauté chinoise), que de déclarer une guerre vouée à la défaite. Mettre les bookies au ban aurait été le meilleur moyen de les envoyer “underground” où les seigneurs de la mafia les attendent pour leur offrir une protection qui mettrait en danger les valeurs d’un Etat de droit. Il valait mieux un contrôle limité du bookie que pas de contrôle du tout ! Ces petites choses demandent une “policy decision” qui, dans ce cas, était impeccable.

“Nous avons aujourd’hui
un ‘Tote le Pep’ et un autre
qui, ne serait-ce qu’implicitement,
ne l’est pas, bien qu’il s’agisse d’une
compagnie cotée à la bourse de Port-Louis.”

Cependant, chaque bookmaker allait devoir se connecter en temps réel aux terminaux des autorités du Value Added Tax Department à travers un software très spécialisé dans ce domaine. Ce logiciel peut à tout moment déceler une soudaine aberration dans le déroulement normal des courses à travers le comportement des punters et mettre ainsi la puce à l’oreille des autorités qui rappliqueraient en temps réel, squad à l’appui, pour saisir le laptop et ses “tell tales”. Bien sûr il restera le crédit qui n’apparaît pas dans les livres mais, “the proof of the pudding is in the eating” : l’acharnement qu’ont mis certains à se battre contre l’introduction de cette technologie est une preuve amplement suffisante qu’elle ne les laisse pas aussi indifférent qu’on voudrait nous faire accroire. Après un appel à la Cour suprême pour la protection de leur droit constitutionnel à la magouille, le désespoir de certains devant une ère nouvelle de transparence les a poussés à prendre des risques énormes pour sectionner le câble, pourtant hautement protégé, qui allait transmettre ces données à la veille de la première journée des courses.

Il est nécessaire, à ce stade, de faire ressortir que le bookie a bon dos mais “it takes two to tango”. Sans les malfrats qui pullulent au Champ de Mars déguisés en honnêtes propriétaires d’écurie, d’entraîneurs intègres, de propriétaires de chevaux férus d’un sport de gentilhomme et de jockeys “professionnels”, la magouille qu’on met sur le dos du “fixed odd betting” n’aurait pas eu de cours.

Dans un pays ou on dépense une centaine de millions sur l’Icac, comment les avoirs de ces messieurs ne sont pas déclarés chaque année avec un suivi rigoureux au niveau local et international est une absurdité.

Après avoir longuement élaboré le système de transparence et de démocratisation au Mauritius Turf Club (MTC) et avoir explicité la méthode de travail des bookmakers, il s’agit de voir trois autres aspects se rapportant à l’industrie des courses hippiques.


Le Tote et le “off course”

Il était un fait qu’Automatic Systems Limited (ASL), compagnie organisatrice du Tote, allait elle aussi avoir à faire des concessions pour mériter la baisse d’impôts que le gouvernement allait opérer pour donner un nouvel essor aux courses et permettre au Champ de Mars de regagner sa vitalité d’antan. Le Tote avait en fait énormément à gagner car, étant de nature totalement transparente dans sa méthodologie, le gouvernement allait s’en servir comme un des principaux leviers contre les paris illégaux.

En sus d’engranger plus de bénéfice on course au Champ de Mars avec la baisse des impôts, le Tote allait profiter directement de la décision du gouvernement de livrer la bataille chez les organisateurs de paris illégaux hors du Champ de Mars, à travers tout le pays. La décision était de permettre à ASL d’opérer au départ cinq succursales. Pour être strictement “fair”, le bookmaker enregistré et connecté à son software, allait lui aussi avoir le droit de travailler off course.

Le “pound of flesh” que le Tote allait payer pour cette manne que lui envoyait le gouvernement allait être en termes d’une participation de 25 % à 30 % de la State Investment Corporation au sein de Drapers, la holding company d’ASL.

Toute la démarche dépendait de l’évaluation des actions d’ASL sur laquelle serait basé le prix d’achat de la State Investment Corporation (SIC). Les autorités ont encouragé le président d’ASL et le managing director de la SIC à se rencontrer sur ce point. C’est l’échec de ce pan du puzzle qui vient aujourd’hui tourmenter ASL et semer la discorde entre le MTC et le gouvernement

Comme pour le reste de ce dossier, il était important que chaque spécialiste reste en charge de son secteur pour lequel il conserve la responsabilité finale. Ces secteurs étaient nombreux : fisc pour la comptabilité de l’effet de la baisse des impôts ; légal pour le texte du Horse Racing Board Bill ; informatique pour le software server ; administratif pour le rôle de la police des jeux, etc.

Ainsi, Seilendra Gookhool, patron de la SIC, a eu des échanges pendant près de deux ans avec Jean Hardy sur la valeur des actions d’ASL. Le jeune patron de la SIC craignait que le prix auquel le Tote voulait vendre ses actions ne tienne pas compte de l’apport que le gouvernement donnait à la compagnie à travers la détaxe et le off course betting. Les discussions prirent tant de temps qu’entre-temps, le Horse Racing Board (HRB) fut mis en place avec à sa tête Kris Lutchmeenaraidoo.

La SIC posa beaucoup de questions et reçut beaucoup de réponses sur la faible profitabilité d’ASL ainsi que sur la pratique de distribution de dividende trouvée un peu généreuse. La vétusté du système informatique d’ASL donnait aussi des anxiétés à la SIC ainsi que la relation contractuelle entre la Management Company Hardy Henry et la compagnie ASL.

Mais le deal breaker allait être l’évaluation des actions de Drapers. En juin 2004, il s’avéra que les deux parties ne pouvaient seules trouver une réponse à ce problème. Il fut donc décidé d’un commun accord entre les deux parties de faire appel à Kemp Chatteris Deloitte and Touche (KCDT) qui se pencherait sur un exercice d’évaluation après avoir conjointement rencontré ASL et SIC qui leur firent part de leurs points de vue respectifs. Dans l’esprit d’ASL, cet exercice de KCDT allait servir d’arbitrage auquel devraient se plier les deux parties.

Il est sans doute intéressant du point de vue historique de se rappeler que l’évaluation des actions de la Holding Company d’ASL par KCDT était de Rs 27 à un moment où son cours à la Bourse de Port-Louis était dans les alentours de Rs 32.

Mais cet aspect du dossier s’acheva sur une déception car la SIC ne fut pas satisfaite du prix avancé par KCDT qu’elle ne semblait pas du reste considérer comme un arbitre sur la question. ASL se défend que la SIC ne lui a pas fait de contre- propositions et a joué aux abonnés absents.

Quoi qu’il en soit, comme il n’était pas de notre habitude de forcer les responsables de ce niveau de poursuivre une stratégie qu’ils ne jugeaient pas optimale pour leur organisation, the deal fell through ! Le lecteur qui, à travers ce dossier, voudrait confirmer son a priori pour ou contre ASL sera certainement déçu car il n’y eut pas de méchant et de bon larron dans cette histoire. Il y eut seulement une belle occasion ratée.

Comme les autres aspects du dossier avaient, eux, progressé de façon satisfaisante, il ne pouvait être question de tout remettre en cause parce que les pourparlers entre la SIC et ASL n’aboutirent pas à l’association espérée entre ces deux organismes.

Est-ce que le gouvernement aurait dû bloquer les cinq off-course outlets d’ASL en vue de mettre de la pression pour faire baisser la valeur des actions de la compagnie bien que cela aurait pu entre- temps jouer en faveur des paris illégaux ? Est-ce que le gouvernement aurait dû forcer la main de la SIC ? Est-ce qu’en hindsight, le board d’ASL n’aurait pas préféré un prix de vente forfaitaire à la SIC plutôt que d’avoir aujourd’hui un concurrent directe qui fait infléchir sa valeur boursière ? Jean Hardy aurait-il dû faire plus de concessions sur l’organisation interne d’ASL ? Autant de questions qui appartiennent au domaine de la conjecture, donc essentiellement stérile.

Comme nous le disions, les autres aspects du dossier allaient bon train, le HRB avait déjà commencé à recruter


La police des Jeux

Un évènement au Champ de Mars allait motiver les autorités à considérer la formation d’une police des Jeux incorruptible comme un élément incontournable du changement que nous voulions amener aux courses. Ce fait divers qui nous fut rapporté démontrait que la loi de la jungle avait vraiment pris racine au Champ de Mars.

Il y a quelques années de cela un cavalier français, grand favori d’une course qu’il ne pouvait perdre avait dû, à bout de moyens pour retenir son cheval, carrément enlever ses deux pieds de l’étrier avant de se projeter par terre et perdre la course. Quand le président du MTC raconta la chose au président de l’Organisation internationale des clubs hippiques, celui-ci répondit : “Si vous m’aviez demandé le nom du jockey français le plus propre, je vous aurais donné son nom.” La mafia avait tout simplement menacé la famille de ce jockey s’il gagnait la course !

Il fallait refermer l’étau sur les courses truquées et autres magouilles. Le software server sur lequel la State Informatics Limited conseillait le gouvernement allait être complémenté par une police des Jeux avec deux inspecteurs triés sur le volet. On réussit à obtenir deux hommes de grande intégrité, correctement motivé, pour imposer de la discipline au Champ de Mars.

Il y eut pas mal de barrières administratives à surmonter car il fallait que les membres de ce squad gardent leur statut de policiers avec “power of arrest”, soit sous l’autorité du Commissioner of Police, reçoivent une appréciation salariale qui ne provienne pas de la police, tout en se donnant totalement à l’industrie des courses. Nous eûmes l’apport et le conseil d’un officier de police de Western Australia spécialisé dans la matière qui visita le pays.

L’Etat de Western Australia nous servit en quelque sorte de modèle. La tache la plus ardue est, on doit le reconnaître, de faire le commissaire de police accepter qu’un de ses officiers soit rémunéré correctement car il craignait les précédents et les frictions que cela aurait pu créer. Mais inversement, envoyer un policier aussi droit fut-il parmi tant de filous alors qu’il a un salaire de Rs 15 000 n’était psychologiquement pas envisageable.

On y arriva jusqu’à ce que cette police des Jeux tomba sous la tutelle du surintendant Raddhoa avec les résultats qu’on connaît. Les dernières nouvelles veulent que cette branche lui a été enlevée à cause de sa très grande activité ailleurs. Il faudrait espérer que sa dignité d’antan y retourne et que les hommes intègres choisis au départ reviennent donner la confiance au public qui est aujourd’hui une commodité rare au Champ de Mars.


La Terre Promise à Bagatelle

Un des aspects du Illovo deal était l’achat par l’État de 3 000 arpents à Bagatelle, près de Réduit, au prix agricole de Rs 125 000 l’arpent alors que ces terres valaient un million l’arpent. Le Champs de Mars était, au dire de tous, devenu trop exigu et dangereux pour contenir les activités hippiques.

Le MTC et le VPM avaient jeté leur dévolu sur une terre de Médine, pas loin de Bambous pour un futur hippodrome au cas où l’industrie relèverait la tête. C’est à ce moment que leur attention fut redirigée sur Bagatelle. Le principe accepté, l’emplacement exact des 130 arpents au sein des 3 000 arpents était crucial. Trop près de l’autoroute, l’hippodrome aurait englouti les terres les plus prisées. Trop près de Mon Désert Alma, la pluviométrie aurait été néfaste aux courses. De plus, un des voisins de l’hippodrome était ni plus ni moins le barrage de Bagatelle qui fournirait l’eau à tout Port-Louis. Il est un fait, par ailleurs, que la présence de l’hippodrome au centre du terrain de l’Etat aurait aussi apporté une valeur ajoutée à ces terres et à la région.

L’objectif global était que si tous les axes mentionnés en haut étaient couronnés de succès, l’industrie renouerait avec des finances florissantes qui lui permettraient d’offrir un magnifique hippodrome à Bagatelle aux turfistes mauriciens. Là, sur 130 arpents, la SIC, State Land Development Corporation et le MTC pourraient conjointement construire un hippodrome avec de longues lignes droites qui rendraient le pulling plus évident. On pourrait aussi y bâtir, comme ailleurs, des demeures pour séquestrer les jockeys “incommunicado” entre le jeudi où les programmes sont annoncés et le jour des courses.

L’ambition était de créer un réel centre équestre avec les caractéristiques principales et spécifications suivantes : piste de 1 500 mètres (Champ de Mars environ 1 300 m) ; tribunes pour accueillir 6 000 personnes ; piste d’entraînement sur 13 arpents ; un espace écurie pour 400 chevaux ; deux barns de quarantaine pour 48 chevaux ; une clinique vétérinaire pouvant accueillir 20 chevaux ; une spelling farm (40 chevaux) ; trois piscines ; un centre equitaid de thérapie pour enfants autrement capables ; un club hippique reflétant l’arc-en-ciel mauricien et pouvant accepter 70 chevaux pour le show jumping ; un apprentice academy ; un stud farm ; cinéma, magasin et, comme on l’a mentionné en haut, des appartements où les jockeys pourraient être en quarantaine sans aucun contact avec le monde extérieur pendant 48 heures avant les courses.

Ce rêve national peut encore être réalisé si le gouvernement et le MTC enterrent la hache de guerre plutôt que de se regarder en chiens de faïence. C’est en quelque sorte le rôle du HRB de faire ce pont car il n’est pas de son intérêt que l’atmosphère se détériore dans ce domaine.

Il ne reste qu’un petit commentaire anodin sur l’état actuel des relations humaines au Champ de Mars. Nous ne comprenons pas comment deux hommes intelligents comme Me Hiren Jankee, chairman du HRB et Me Clive Auffray, son directeur, s’offusquent que Jean-Michel Giraud ait qualifié de chantage le retard avec lequel le gouvernement a, à travers le HRB, donné son aval au calendrier de 2006, car c’est bel et bien un chantage.

Nous ne comprenons pas davantage comment Jean-Michel Giraud soit si offusqué devant ce chantage. L’octroi de la clause d’exclusivité que le MTC donna à ASL en fin d’année au lendemain de l’annonce d’un concurrent était un magistral pied de nez aux autorités et au principe de transparence et de démocratie. Il ne laissait aucun choix aux autorités. Malgré les relations amicales, dans de pareilles circonstances, nous l’aurions fait pareillement chanter !

12 April 2006

Pour une distribution équitable et transparente des terres de l’État


Il existerait une forte demande pour les terres littorales pour divers projets, d'où la necessité d'un système de distribution plus adapté aux réalités.

l'express du 12/04/2006

Par Jean-Mée DESVEAUX
 
Devant les menaces réelles que court l’île Maurice que le ciel lui tombe sur la tête au niveau international, on aurait pu s’attendre à ce que les responsables du pays mettent un peu d’ordre dans leur propre case afin de limiter les dégâts. Au lieu de cela, ce que nous voyons tous les jours, tous gouvernements confondus, est une absence de stratégie dans divers domaines qui résulte à se tirer dans les propres pattes.

Le plus grand danger qui menace l’île Maurice est, sans nul doute possible, la propension à la corruption qui a envahi toutes les sphères de la vie économique du pays. Il faut vraiment se voiler la face pour ne pas reconnaître qu’à Maurice on peut compter sur les doigts d’une main les hommes et femmes politiques pour qui le bien-être du pays passe avant les leurs. Or, de toutes les instances où cette inclination est le plus titillée, le processus d’allocation des Pas géométriques qu’on distribue sans rime, ni bon sens est le plus envoûtant.

À cause d’un terrain sur le littoral, un jeune activiste du Parti travailliste aurait été empoissonné au cyanure sans que qui que ce soit ne soit poursuivi en justice. C’est dire à quel point les commanditaires de ce geste crapuleux sont puissants. Teeren Appasamy avait, à travers ses contacts politiques, accumulé un lot intéressant de terrains sur le littoral est, dont il se servait du reste pour affubler des noms à ses sociétés. Le ministre Choonee subit le déshonneur d’être détenu pour une affaire de Pas géométriques. Même blanchi aujourd’hui, il traînera toujours cette plaie qui l’accompagnera au poste illustre qu’il a été jugé capable de remplir au sein d’une de nos plus importantes ambassades. Son successeur au ministère de Terres, dont la culpabilité n’a pas encore été prouvée, semble être pris dans le même engrenage. Le dommage collatéral pour nos institutions fiscales dont M. Dulull a été une figure de proue, est inestimable.

Et pourtant, on n’a pas besoin d’être Jérémie pour savoir que cela n’ira qu’en empirant pour des raisons aussi évidentes qu’elles sont évitables. Le douzième annual business trend survey de la MEF souligne que les mesures du gouvernement ne réussissent pas à combattre la corruption qui agit comme un frein à notre croissance économique. 81% des chefs d’entreprises sondés par l’organisation patronale considèrent que les mesures utilisées par les autorités pour combattre la corruption sont inadéquates. “This is serious as corruption is a complete turn-off for investors. It is thus extremely significant to note that 100% of respondents in agriculture (NdlR: où les terres entrent en jeu) is still an obstacle.”

Comme le fait ressortir Rabin Bhujun dans l’express dimanche, nous avons récemment reçu la visite d’experts australiens dans le cadre d’une land management scrutiny mission qui viserait enfin à réorganiser la gestion du patrimoine foncier mauricien. Bien que leurs conclusions soient parfaitement valables, ils ne nous ont rien dit que nous ne savions pas déjà : “Corruption, the undue influence of powerful people and improper political interference” mine le système actuel. Ce rapport déplore les procédures existantes qui permettent à un seul homme, le ministre des Terres, d’allouer les Pas géométriques à bail au lieu de faire des appels d’offres publics : “The guidelines covering the allocation of land by this means are unclear and creates opportunities for inappropriate allocation of valuable state land without public scrutiny.”

En effet, aussi bête que cela puisse paraître, les incohérences que nous subissons dans ce domaine sont la conséquence logique de la tentative bien mauricienne de substituer les libres forces du marché par un stratagème dans la distribution d’un bien ou la demande excède de loin l’offre. Il est d’une absurdité débridée qu’un pays puisse être aussi pointilleux au niveau des appels d’offres pour tout ce qui est passation de marché public à partir de Rs 25 000 mais permet en même temps que quelques commis de l’état sous le joug d’un ministre décident de l’allocation de centaines d’arpents coûtant chacun entre Rs 5 et Rs 30 millions.

On peut dénombrer trois sphères aujourd’hui où les Pas géométriques jouent un rôle primordial : A) les hôtels B) les campement sites, et C) certains Integrated Resort Schemes (IRS). Bien que chacun de ces trois espaces ait des particularités qui leur sont propres et qui ne sont donc pas assimilables aux autres, le fil conducteur du Pas géométrique devrait enfin se plier dans tous les cas à un traitement économique pour obtenir les effets désirés : 1) d’équité vis-à-vis de l’acheteur qui est souvent un groupe étranger chez qui on risque de souiller l’image de marque du pays, 2) de transparence vis-à-vis de la population qui perd ainsi un espace qui devrait être inaliénable et finalement 3) d’optimisation des ressources nationales d’une telle rareté qu’elle est appelée à disparaître rapidement.


A : les hôtels :

La politique qui était logique quand Le Chaland était le seul hôtel du pays au lendemain de l’Indépendance ne l’est plus aujourd’hui que nous avons une centaine d’hôtels parsemés autour de l’île. On pouvait jusqu’à un certain moment prétendre que l’incitation financière que représente la quasi-gratuité des terrains de l’état sur le littoral a été une stratégie payante pour faire de Maurice une île cinq-étoiles. Mais le statut de Maurice n’est plus à faire et il serait temps qu’après une bonne étude du marché et des bénéfices à engranger dans les années à venir, les nouveaux venus démontrent leur motivation à travers des offres cachetées au Central Tender Board, une institution qui, sous M. Baguant, est un honneur pour ce pays. Les meilleurs terrains restants iront aux plus offrants après que d’autres critères, préalablement établis, de fiabilité du dossier ont été satisfaits.

Le renouvellement de ces baux industriels d’hôtels pourrait être pareillement traité pour éviter que ne soit utilisée une nouvelle génération d’émissaires qui feraient le pas de porte devant une nouvelle génération de futurs ministres des Terres. Ce qui rend inévitable la nécessité de revoir la stratégie désastreuse qui prévaut, c’est que l’insuffisance grandissante des terrains du littoral augmente leur prix réel de façon incontrôlée. Plus le prix de la cagnotte est fort, plus l’aversion naturelle au risque de se faire attraper est automatiquement affaiblie, augmentant ainsi la hardiesse des entremetteurs et autres agents.

Avec un salaire de Rs 60 000 par mois, un futur ministre des Terres verrait ses émoluments durant son premier mandat arriver à un peu plus de Rs 3 millions. S’il peut aspirer à encore deux mandats ministériels consécutifs (un si majuscule), il se ferait une petite entrée de Rs 9 millions après douze ans de dur et honnête labeur au service de son pays. Mais puisque la superficie en question est généralement gargantuesque, où mettre la barre en l’absence de toute formule économique qui éclairerait le transfert? À Rs 50 millions par exemple, il retrouverait l’équivalence en salaires de 16 mandats de quatre ans. S’il peut d’un seul coup de plume dont l’essentiel serait “I recommend to my colleagues… ” dans un cab paper au Conseil des ministres que tel ou tel individu mérite que l’état lui fasse le don d’une fortune absolument colossale, pourquoi n’en percevrait-il pas, lui qui rend ce transfert de richesse possible, une quote-part de la transaction. Le décalage est apte à donner du vertige à certains (futurs) ministres et réduire ainsi leur capacité décisionnelle à néant avec des conséquences toujours plus fâcheuses pour le pays.

Une autre façon d’appréhender l’illogisme, l’opacité et l’iniquité du présent système nous est offerte par un nouvel établissement de la côte est qui avait besoin de dix hectares du littoral appartenant au privé ainsi que 11,8 hectares de terres de l’état sur ce même littoral. Alors que la letter of intent aliène à tout jamais les terres de l’état ainsi requises pour quelques dizaines de milliers de roupies par an, on peut deviner que le prix que ce même groupe hôtelier a dû payer pour obtenir quasiment la même superficie du privé se situerait quelque part entre Rs 100 et Rs 200 millions. On serait en droit de se demander de quel droit un gouvernement de passage oserait-il montrer une telle générosité avec le bien dont le peuple lui a confié la garde pendant son mandat et qui est donc loin de lui appartenir comme appartient, disons, le Sun Trust au trustee du MSM. L’analogie n’est pas sans valeur didactique quand on se rappelle comment ce parti s’est démené pour poursuivre l’état qui l’avait selon lui lésé. Un exemple s’il en fallait que les politiciens ont en général une propension à être bien “plus généreux” avec le bien du peuple qu’avec le leur : Rs 45 millions de plus pour être exact.

Une autre aberration auquel donne lieu le système actuel, c’est qu’il encourage des projets qui ne tiennent pas la route. Ce système qui privilégie trop souvent la proximité avec le pouvoir encourage beaucoup d’inefficience économique. Un nouvel hôtel a déjà changé de gérance après un grand fracas qui n’a pu que nuire au tourisme mauricien et est à la veille de changer de main. Il n’est pas le seul. Beaucoup de faux départs qui laissent leurs séquelles ont été causés par cette distribution intempestive des terres aux projets hôteliers.

Le présent Coco Beach Hotel n’a pu finalement trouver son équilibre qu’après deux ou trois passations car un politicien de renom s’était ingéré dans un processus qui aurait dû être above board. Puisqu’il n’y a pas comme l’ingéniosité de l’humain pour exploiter les failles d’un système, il y a une nouvelle flopée d’affairistes qui cherchent d’abord le bout de terre pour ensuite chercher, de part le monde, l’investisseur qui lui permettrait de capitaliser son boute qu’il a gagné au bout de sempiternelles visites ministérielles en tant que lèche-botte. Un de ces projets qui vise ni plus ni moins toute la côte sud-ouest en est à son sixième groupe d’investisseurs. Un système qui fait de nos hommes d’affaires des fly by night operators nuit grandement au devenir économique du pays. De plus, il décourage l’investisseur étranger qui se voit ainsi forcé de payer un fort premium à un intermédiaire alors qu’il aurait dû tout seul, de plein droit, revendiquer le bail que l’autochtone détient grâce à son investissement.


B : “campement sites”

Ayant déjà couvert ce sujet en long et en large dans deux précédents papiers, nous ne nous y attarderons pas. Il suffit seulement ici de dire que l’orage, qui s’est abattu sur l’Hôtel du gouvernement durant ces deux dernières semaines en termes de dépositions, enquêtes policières, dénonciations, démentis, ressemblera à un pique-nique en comparaison à ce qui se passera durant les années précédant la fin des baux des campement sites. Pour rappel, sur les 1 243 campement sites leases, 115 arriveront à expiration avant 2020 ; 419 en 2020 et 706 en 2040.

On peut imaginer sans trop de difficulté l’état d’esprit des “propriétaires” à l’approche de ces échéances si entre-temps le gouvernement ne s’est pas prononcé sur une politique transparente qui s’appliquerait équitablement à toutes les parties concernées. Leur anxiété très naturelle fera d’eux la proie d’une armée de “facilitateurs” depuis la tea lady jusqu’au planton du département gouvernemental le plus obscur.

Comme nous l’avons signalé déjà, les techniciens du ministère des Terres ont fait une ébauche de la marche à suivre qui peut servir de point de départ. Cette réflexion peut être améliorée et parachevée de sorte à éviter tout chaos. Si on veut éviter les probables dérapages, il faut empêcher que ces renouvellements reposent sur le bon vouloir d’un “prince” de l’état qui n’aurait aucune consigne gouvernementale sur laquelle s’appuyer pour arriver à une décision objective.

Nous reviendrons dans les jours qui suivent sur le troisième volet de ce dossier : l’espace IRS.

Nous pensons qu’il est apte de clôturer cette réflexion avec une citation du PM repris par Rabin Bhujun dans l’express dimanche. Navin Ramgoolam avait fait ressortir lors d’une réunion regroupant des ministres et des hauts fonctionnaires : “Nou sel pays kot donne banne Pas zeometrik inestimab koum-ca a la lezer. Pou bizin mette lord ladan.”

Le transfert des Pas géométriques ayant acquis la triste réputation que nous connaissons dans les mœurs de tous les bords politiques, le Dr Ramgoolam ferait montre d’une volonté de transparence et de propreté sans pareille s’il arrivait, dans les mois à venir, à mettre en place un système d’attribution des terres de l’état sur une base d’appel d’offres et d’autres mécanismes transparents. Ce serait là un signe de leadership politique qui redorera le blason d’un chef du gouvernement quelque peu secoué par la crise actuelle.

05 April 2006

“Nous accentuons nos efforts pour réduire les pertes de revenus”

QUESTIONS A BERT CUNNINGHAM, CONTROLLEUR DES DOUANES.

 ● Dans quelle mesure le département des douanes peut-il contribuer à alimenter les caisses de l’État et aider à réduire le déficit budgétaire ?

Le ministère des Finances nous a demandé nos suggestions en vue de rehausser les recettes dans le cadre des préparatifs du prochain budget. De notre côté, nous accentuons nos efforts pour réduire les pertes de revenus douaniers découlant de la sous-évaluation des marchandises importées.

La sous-évaluation reste un problème majeur à la douane. Nous faisons aussi face à la contrebande.

Mais malgré le fait que les douanes sont une source très importante des revenus de l’État - nous collectons légèrement moins que 50 % des revenus de l’État – il est évident que le montant des recettes que la douane va récupérer va diminuer avec le temps. Les recettes de la taxe à valeur ajoutée (TVA) et de l’impôt devront pouvoir prendre la relève des recettes douanières. C’est une des raisons pour lesquelles la Mauritius Revenue Authority (MRA) a été créée. Elle va s’assurer que les autres départements du fisc soient modernisés pour être en mesure de collecter plus de revenus.

Avec la réduction continue des tarifs d’importation, il ne faut pas s’attendre à ce que la douane rapporte le gros des revenus de l’État. Toujours est-il que la douane va continuer à collecter la TVA sur les importations et les excise duties sur les boissons alcoolisées et les cigarettes.


Quelles sont les mesures qui sont introduites pour combattre les fraudes commerciales ?

Nous utilisons maintenant de nouveaux scanners de rayon X au port et à l’aéroport pour traquer les tentatives de fraude. Pour l’instant, nous procédons au scanning des conteneurs de manière sélective. Seulement les cargos jugés à haut risque sont scannés. Nous évoluons vers une situation où il y aura de plus en plus de conteneurs qui vont être soumis à un scanning. Nous décidons si les conteneurs devront être ou pas soumis à une inspection plus minutieuse à partir des résultats de l’exercice de scanning.

Nous avons aussi quatre équipes de chiens renifleurs qui aident dans les opérations de vérification. Les chiens sont très efficaces à détecter la drogue. Pas plus tard que la semaine dernière, ils ont décelé de la drogue dans un colis à la poste. Nous allons renforcer l’entraînement des chiens renifleurs.

Nous avons mis en place un guichet unique au terminal au port. Les officiers des ministères de l’Agriculture et de la Santé sont présents à ce guichet pour délivrer les permis nécessaires aux opérateurs. Les heures d’ouverture de ce service ont été étendues de 7 heures à 19 heures. Les importateurs et les agents auront la possibilité de planifier l’inspection de leurs cargos durant cette période. Cela nous permet d’harmoniser nos heures d’opération avec celles de la Cargo Handling Corporation.

Nous sommes également dans un processus de révision des lois et régulations douanières. Nous sommes en train de revoir les procédures pour les mettre au diapason des meilleures pratiques mondiales.

Nous travaillons actuellement sur la publication d’un manuel de procédures standardisées pour notre personnel. Ce document sera aussi disponible à tous les opérateurs. Ils sauront quelles sont les règles du jeu et il n’y aura pas de discrétion dans l’application de ces systèmes.

Sur le plan de l’informatisation, les certificats EUR1 seront bientôt disponibles en ligne. Il y a eu plusieurs cas de fraude concernant ces certificats l’année dernière. Nous avions ainsi décidé de changer la manière d’octroyer ces permis. Les exportateurs vont très prochainement pouvoir faire des demandes pour ces certificats par voie électronique. Les formulaires seront assortis de plus de sécurité. Il sera très difficile de fabriquer de faux documents.

Le nouveau système permettra aux douanes européennes de vérifier l’authenticité des EUR1 en accédant au site Web concerné. Je crois que nous serons les premiers au monde à proposer un tel système qui est destiné à prévenir l’octroi frauduleux des certificats d’exportation. L’année dernière, les autorités douanières de l’Union européenne ont mis en cause plusieurs certificats.

Nous procédons aussi à une réforme du secteur d’excise duty. Nous comptons introduire des caméras CCTV chez les fabricants et embouteilleurs des boissons alcoolisés. Cela aidera à réduire les coûts que ces entreprises doivent encourir avec la présence physique des officiers de douane dans leurs locaux.

Nous travaillons ensemble avec la British American Tobacco en vue d’introduire un band roll sur les paquets de cigarettes pour que nous puissions identifier les produits qui sont contrefaits ou qui sont commercialisés en contrebande. Nous espérons pouvoir mettre en place les band rolls vers la fin de cette année.


Quelles sont les premières retombées de ces initiatives ?

La douane a été très active dans le combat contre la fraude. Le nombre de délits que nous arrivons à détecter a augmenté de manière significative. En même temps, je dois préciser que les opérateurs ont beaucoup amélioré leur degré de conformité aux règles.

Beaucoup de commerçants et d’industriels ont compris notre message et réalisent que la douane est très active à faire des vérifications et des enquêtes. Le montant de recettes que nous récupérons à la suite des enquêtes démontre que nous obtenons des résultats. Je concède toutefois qu’il y aura toujours des opérateurs qui vont transgresser les règles.


Est-ce que les mesures pour combattre la fraude ne gênent-elles pas ceux qui opèrent de manière honnête ?

Nous travaillons actuellement sur un système de fast track qui a pour objectif de permettre aux gros importateurs qui sont en règle avec les lois de travailler sans être contrariés par des procédures encombrantes. Nous avons identifié dans un premier temps 50 plus gros importateurs en termes de valeur de marchandises qui ont de bonnes références. Nous allons changer la manière dont nous inspectons les cargos de ces compagnies.

Nous procéderons à la vérification des marchandises dans l’enceinte des entreprises en question et non au port ou à l’aéroport. Elles ne seront pas soumises aux mêmes normes d’inspection que celles qui sont à risque ou celles qui importent pour la première fois. Nous voulons récompenser les compagnies qui travaillent dans le respect des règles.

Les 50 plus gros importateurs représentent 35 % de la valeur totale des produits importés. Le fast track nous aidera à focaliser notre attention sur les fraudeurs potentiels. Je suis confiant de mettre en place un tel système jusqu’à la fin de l’année.


La facilitation des échanges internationaux est une priorité de la douane…

La douane fait tout son possible pour faciliter le dédouanement des importations. Mais il n’y pas que les services de douane dans la facilitation du commerce. Il faut que tous les partenaires tels les transitaires, les courtiers, les représentants de lignes maritimes, les opérateurs de la manutention, les services des ministères du Commerce, de l’Agro-industrie et de la Santé jouent le jeu. Si l’un d’entre eux ne joue pas le jeu, tout le processus est retardé. La douane n’est qu’un maillon dans cette chaîne. Tous les partenaires devront travailler ensemble si nous voulons que les cargos quittent le port et l’aéroport dans les meilleurs délais.

Si nous n’offrons pas ce type de facilité, les investisseurs ne viendront pas investir à Maurice. Il faut un comité de haut niveau pour se pencher sur les goulots d’étranglement dans le système d’autorisation des cargos. La douane ne peut forcer les autres partenaires à devenir plus efficaces. Il faut une autorité plus haute pour régler ces problèmes.


La construction d’un nouveau quartier général de la douane va dans le droit fil pour plus d’efficacité…

Les travaux de la nouvelle Customs House devront être complétés dans les 18 prochains mois. Il s’agit là d’une initiative majeure. Nous devons encore compléter les plans d’aménagement intérieur du bâtiment. La Customs House est destinée non seulement à notre personnel mais sera utilisée par tous les opérateurs tels les transitaires et les courtiers en douane. Nous voulons nous assurer que l’immeuble leur offre un cadre convivial pour travailler.

Je pense que lorsque les services de douane vont s’installer dans les nouveaux locaux à la Mer Rouge, il faudrait trouver un moyen pour que les opérateurs puissent s’installer tout près de nous pour une meilleure efficacité. C’est la raison pour laquelle, nous n’allons pas occuper tout le terrain dont nous disposons. Nous travaillons ensemble avec la Mauritius Ports Authority sur l’idée de construire un nouveau bâtiment pour abriter les opérateurs, tels les transitaires, les customs agents, les lignes maritimes, les banques et les transitaires. Je peux vous dire qu’il y a beaucoup d’enthousiasme autour de cette idée.


Dans quelle mesure la création de la MRA va-t-elle donner une impulsion à la modernisation de la douane ?

Le lancement de la MRA est un des principaux changements dans le collimateur. Nous souhaitons pouvoir rendre le nouvel organisme opérationnel à partir du 1er juillet. La douane sera un des départements au sein de la MRA. La plupart des directeurs de l’organisme ont déjà été recrutés. La prochaine étape est de procéder au recrutement des senior managers des différents départements.

Au niveau de la douane, nous procéderons très prochainement à la sélection des cadres pour les catégories de chefs de section et de team leaders. Nous allons aussi recruter quelque 60 managers. Tous les managers actuels qui souhaitent travailler à la MRA devront postuler les postes qui seront créés. Ils doivent aussi déclarer leurs avoirs.

Si nous ne trouvons pas suffisamment des gens en interne, nous allons devoir recruter sur le marché. Les officiers qui sont en ce moment à des niveaux inférieurs au sein de l’organisation ont la possibilité de postuler des jobs de managers s’ils possèdent les qualifications nécessaires. L’ancienneté ne sera pas un handicap pour grimper les échelons. Les critères de qualification et de la performance des candidats lors des exercices d’entretien seront déterminants. C’est aussi une opportunité pour injecter du sang neuf à la douane.


Les fraudes douanières se font très souvent grâce à la complicité des douaniers. Que faites-vous pour prévenir ces pratiques dans le service ?

Nous avons introduit quatre équipes anti-contrebande et anti-drogue. Leur tâche est de contre-vérifier les marchandises qui ont été inspectées préalablement par d’autres officiers. C’est là un moyen de réduire le niveau de la corruption dans le système.

Nous recherchons aussi la collaboration des autres partenaires. Si par exemple, un courtier en douane soupçonne un cas de fraude, il m’informe et nous agissons sur-le-champ. Nous recevons beaucoup d’information sur notre hot line.

Il faut bâtir des checks and balances dans le système pour ne plus inciter les gens à s’adonner à la corruption. L’avènement de la MRA va aider à réduire la corruption. D’abord, les salaires seront plus attrayants. Il y aura aussi de nouvelles procédures disciplinaires. Il y sera beaucoup plus facile de sanctionner les officiers trouvés coupables de fraude qu’il ne l’est actuellement. Il y aura de nouveaux codes de conduite. Le processus de sélection pour les postes de management va réduire les chances que les cadres peu crédibles soient recrutés au sein de la MRA.


Votre détermination à réformer la douane ne fait pas plaisir à beaucoup. Vous avez été jusqu’à soumettre votre démission. Êtes-vous plus serein aujourd’hui ?

Je ne suis pas très sûr si c’est le calme avec la tempête ou si la tempête est déjà passée. Je pense que le jour du jugement est venu pour beaucoup de ces personnes. Plusieurs de ces managers vont devoir postuler les nouveaux jobs à la MRA.

La MRA aura besoin du sang neuf. Nous devons nous assurer que cela soit une réalité. Mais ceux qui sont à des échelons inférieurs au rang de managers obtiendront un transfert automatique. Il incombe aux nouveaux managers de veiller à ce que ces officiers opèrent de façon honnête.

La plupart de notre personnel est satisfait des conditions de service qu’offre la MRA. C’est la raison pour laquelle les choses se sont calmées.

Propos recueillis par
Akilesh ROOPUN

l'express du 5 avril 2006