JM et les chefs coutumiers de la République démocratique du Congo

05 April 2006

“Nous accentuons nos efforts pour réduire les pertes de revenus”

QUESTIONS A BERT CUNNINGHAM, CONTROLLEUR DES DOUANES.

 ● Dans quelle mesure le département des douanes peut-il contribuer à alimenter les caisses de l’État et aider à réduire le déficit budgétaire ?

Le ministère des Finances nous a demandé nos suggestions en vue de rehausser les recettes dans le cadre des préparatifs du prochain budget. De notre côté, nous accentuons nos efforts pour réduire les pertes de revenus douaniers découlant de la sous-évaluation des marchandises importées.

La sous-évaluation reste un problème majeur à la douane. Nous faisons aussi face à la contrebande.

Mais malgré le fait que les douanes sont une source très importante des revenus de l’État - nous collectons légèrement moins que 50 % des revenus de l’État – il est évident que le montant des recettes que la douane va récupérer va diminuer avec le temps. Les recettes de la taxe à valeur ajoutée (TVA) et de l’impôt devront pouvoir prendre la relève des recettes douanières. C’est une des raisons pour lesquelles la Mauritius Revenue Authority (MRA) a été créée. Elle va s’assurer que les autres départements du fisc soient modernisés pour être en mesure de collecter plus de revenus.

Avec la réduction continue des tarifs d’importation, il ne faut pas s’attendre à ce que la douane rapporte le gros des revenus de l’État. Toujours est-il que la douane va continuer à collecter la TVA sur les importations et les excise duties sur les boissons alcoolisées et les cigarettes.


Quelles sont les mesures qui sont introduites pour combattre les fraudes commerciales ?

Nous utilisons maintenant de nouveaux scanners de rayon X au port et à l’aéroport pour traquer les tentatives de fraude. Pour l’instant, nous procédons au scanning des conteneurs de manière sélective. Seulement les cargos jugés à haut risque sont scannés. Nous évoluons vers une situation où il y aura de plus en plus de conteneurs qui vont être soumis à un scanning. Nous décidons si les conteneurs devront être ou pas soumis à une inspection plus minutieuse à partir des résultats de l’exercice de scanning.

Nous avons aussi quatre équipes de chiens renifleurs qui aident dans les opérations de vérification. Les chiens sont très efficaces à détecter la drogue. Pas plus tard que la semaine dernière, ils ont décelé de la drogue dans un colis à la poste. Nous allons renforcer l’entraînement des chiens renifleurs.

Nous avons mis en place un guichet unique au terminal au port. Les officiers des ministères de l’Agriculture et de la Santé sont présents à ce guichet pour délivrer les permis nécessaires aux opérateurs. Les heures d’ouverture de ce service ont été étendues de 7 heures à 19 heures. Les importateurs et les agents auront la possibilité de planifier l’inspection de leurs cargos durant cette période. Cela nous permet d’harmoniser nos heures d’opération avec celles de la Cargo Handling Corporation.

Nous sommes également dans un processus de révision des lois et régulations douanières. Nous sommes en train de revoir les procédures pour les mettre au diapason des meilleures pratiques mondiales.

Nous travaillons actuellement sur la publication d’un manuel de procédures standardisées pour notre personnel. Ce document sera aussi disponible à tous les opérateurs. Ils sauront quelles sont les règles du jeu et il n’y aura pas de discrétion dans l’application de ces systèmes.

Sur le plan de l’informatisation, les certificats EUR1 seront bientôt disponibles en ligne. Il y a eu plusieurs cas de fraude concernant ces certificats l’année dernière. Nous avions ainsi décidé de changer la manière d’octroyer ces permis. Les exportateurs vont très prochainement pouvoir faire des demandes pour ces certificats par voie électronique. Les formulaires seront assortis de plus de sécurité. Il sera très difficile de fabriquer de faux documents.

Le nouveau système permettra aux douanes européennes de vérifier l’authenticité des EUR1 en accédant au site Web concerné. Je crois que nous serons les premiers au monde à proposer un tel système qui est destiné à prévenir l’octroi frauduleux des certificats d’exportation. L’année dernière, les autorités douanières de l’Union européenne ont mis en cause plusieurs certificats.

Nous procédons aussi à une réforme du secteur d’excise duty. Nous comptons introduire des caméras CCTV chez les fabricants et embouteilleurs des boissons alcoolisés. Cela aidera à réduire les coûts que ces entreprises doivent encourir avec la présence physique des officiers de douane dans leurs locaux.

Nous travaillons ensemble avec la British American Tobacco en vue d’introduire un band roll sur les paquets de cigarettes pour que nous puissions identifier les produits qui sont contrefaits ou qui sont commercialisés en contrebande. Nous espérons pouvoir mettre en place les band rolls vers la fin de cette année.


Quelles sont les premières retombées de ces initiatives ?

La douane a été très active dans le combat contre la fraude. Le nombre de délits que nous arrivons à détecter a augmenté de manière significative. En même temps, je dois préciser que les opérateurs ont beaucoup amélioré leur degré de conformité aux règles.

Beaucoup de commerçants et d’industriels ont compris notre message et réalisent que la douane est très active à faire des vérifications et des enquêtes. Le montant de recettes que nous récupérons à la suite des enquêtes démontre que nous obtenons des résultats. Je concède toutefois qu’il y aura toujours des opérateurs qui vont transgresser les règles.


Est-ce que les mesures pour combattre la fraude ne gênent-elles pas ceux qui opèrent de manière honnête ?

Nous travaillons actuellement sur un système de fast track qui a pour objectif de permettre aux gros importateurs qui sont en règle avec les lois de travailler sans être contrariés par des procédures encombrantes. Nous avons identifié dans un premier temps 50 plus gros importateurs en termes de valeur de marchandises qui ont de bonnes références. Nous allons changer la manière dont nous inspectons les cargos de ces compagnies.

Nous procéderons à la vérification des marchandises dans l’enceinte des entreprises en question et non au port ou à l’aéroport. Elles ne seront pas soumises aux mêmes normes d’inspection que celles qui sont à risque ou celles qui importent pour la première fois. Nous voulons récompenser les compagnies qui travaillent dans le respect des règles.

Les 50 plus gros importateurs représentent 35 % de la valeur totale des produits importés. Le fast track nous aidera à focaliser notre attention sur les fraudeurs potentiels. Je suis confiant de mettre en place un tel système jusqu’à la fin de l’année.


La facilitation des échanges internationaux est une priorité de la douane…

La douane fait tout son possible pour faciliter le dédouanement des importations. Mais il n’y pas que les services de douane dans la facilitation du commerce. Il faut que tous les partenaires tels les transitaires, les courtiers, les représentants de lignes maritimes, les opérateurs de la manutention, les services des ministères du Commerce, de l’Agro-industrie et de la Santé jouent le jeu. Si l’un d’entre eux ne joue pas le jeu, tout le processus est retardé. La douane n’est qu’un maillon dans cette chaîne. Tous les partenaires devront travailler ensemble si nous voulons que les cargos quittent le port et l’aéroport dans les meilleurs délais.

Si nous n’offrons pas ce type de facilité, les investisseurs ne viendront pas investir à Maurice. Il faut un comité de haut niveau pour se pencher sur les goulots d’étranglement dans le système d’autorisation des cargos. La douane ne peut forcer les autres partenaires à devenir plus efficaces. Il faut une autorité plus haute pour régler ces problèmes.


La construction d’un nouveau quartier général de la douane va dans le droit fil pour plus d’efficacité…

Les travaux de la nouvelle Customs House devront être complétés dans les 18 prochains mois. Il s’agit là d’une initiative majeure. Nous devons encore compléter les plans d’aménagement intérieur du bâtiment. La Customs House est destinée non seulement à notre personnel mais sera utilisée par tous les opérateurs tels les transitaires et les courtiers en douane. Nous voulons nous assurer que l’immeuble leur offre un cadre convivial pour travailler.

Je pense que lorsque les services de douane vont s’installer dans les nouveaux locaux à la Mer Rouge, il faudrait trouver un moyen pour que les opérateurs puissent s’installer tout près de nous pour une meilleure efficacité. C’est la raison pour laquelle, nous n’allons pas occuper tout le terrain dont nous disposons. Nous travaillons ensemble avec la Mauritius Ports Authority sur l’idée de construire un nouveau bâtiment pour abriter les opérateurs, tels les transitaires, les customs agents, les lignes maritimes, les banques et les transitaires. Je peux vous dire qu’il y a beaucoup d’enthousiasme autour de cette idée.


Dans quelle mesure la création de la MRA va-t-elle donner une impulsion à la modernisation de la douane ?

Le lancement de la MRA est un des principaux changements dans le collimateur. Nous souhaitons pouvoir rendre le nouvel organisme opérationnel à partir du 1er juillet. La douane sera un des départements au sein de la MRA. La plupart des directeurs de l’organisme ont déjà été recrutés. La prochaine étape est de procéder au recrutement des senior managers des différents départements.

Au niveau de la douane, nous procéderons très prochainement à la sélection des cadres pour les catégories de chefs de section et de team leaders. Nous allons aussi recruter quelque 60 managers. Tous les managers actuels qui souhaitent travailler à la MRA devront postuler les postes qui seront créés. Ils doivent aussi déclarer leurs avoirs.

Si nous ne trouvons pas suffisamment des gens en interne, nous allons devoir recruter sur le marché. Les officiers qui sont en ce moment à des niveaux inférieurs au sein de l’organisation ont la possibilité de postuler des jobs de managers s’ils possèdent les qualifications nécessaires. L’ancienneté ne sera pas un handicap pour grimper les échelons. Les critères de qualification et de la performance des candidats lors des exercices d’entretien seront déterminants. C’est aussi une opportunité pour injecter du sang neuf à la douane.


Les fraudes douanières se font très souvent grâce à la complicité des douaniers. Que faites-vous pour prévenir ces pratiques dans le service ?

Nous avons introduit quatre équipes anti-contrebande et anti-drogue. Leur tâche est de contre-vérifier les marchandises qui ont été inspectées préalablement par d’autres officiers. C’est là un moyen de réduire le niveau de la corruption dans le système.

Nous recherchons aussi la collaboration des autres partenaires. Si par exemple, un courtier en douane soupçonne un cas de fraude, il m’informe et nous agissons sur-le-champ. Nous recevons beaucoup d’information sur notre hot line.

Il faut bâtir des checks and balances dans le système pour ne plus inciter les gens à s’adonner à la corruption. L’avènement de la MRA va aider à réduire la corruption. D’abord, les salaires seront plus attrayants. Il y aura aussi de nouvelles procédures disciplinaires. Il y sera beaucoup plus facile de sanctionner les officiers trouvés coupables de fraude qu’il ne l’est actuellement. Il y aura de nouveaux codes de conduite. Le processus de sélection pour les postes de management va réduire les chances que les cadres peu crédibles soient recrutés au sein de la MRA.


Votre détermination à réformer la douane ne fait pas plaisir à beaucoup. Vous avez été jusqu’à soumettre votre démission. Êtes-vous plus serein aujourd’hui ?

Je ne suis pas très sûr si c’est le calme avec la tempête ou si la tempête est déjà passée. Je pense que le jour du jugement est venu pour beaucoup de ces personnes. Plusieurs de ces managers vont devoir postuler les nouveaux jobs à la MRA.

La MRA aura besoin du sang neuf. Nous devons nous assurer que cela soit une réalité. Mais ceux qui sont à des échelons inférieurs au rang de managers obtiendront un transfert automatique. Il incombe aux nouveaux managers de veiller à ce que ces officiers opèrent de façon honnête.

La plupart de notre personnel est satisfait des conditions de service qu’offre la MRA. C’est la raison pour laquelle les choses se sont calmées.

Propos recueillis par
Akilesh ROOPUN

l'express du 5 avril 2006

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